[5 décembre 2024] Fermeture d’usines General Electric d’éoliennes en mer, plan social dans l’usine de pompes à chaleur Saunier Duval, faillite du pionnier suédois des batteries Northvolt : face à cette urgence industrielle et alors que la Commission européenne prépare la suite du Green Deal, le collectif Construire l’écologie a organisé un format de concertation inédit entre les acteurs de trois filières industrielles essentielles à la transition écologique : les batteries électriques, les pompes à chaleur et les éoliennes en mer. Aujourd’hui, le collectif publie les résultats de ces échanges, qui montrent les graves difficultés auxquelles font face ces secteurs industriels en France et en Europe. Ces échanges montrent qu’avec des politiques appropriées, il est possible de préserver et de créer des emplois dans ces activités indispensables pour faire face au réchauffement climatique.
Alors que la question de la transition est généralement formulée comme un enjeu de traduction politique des alertes scientifiques, de mobilisation citoyenne, ou de consensus international, le collectif veut focaliser l’attention sur l’emploi industriel, enjeu clé de la réussite de la transformation écologique.
Un format de concertation inédit
Le collectif Construire l’écologie a rassemblé en septembre 2024, pendant une après-midi, une vingtaine de représentants des trois filières, parmi lesquels des directeurs d'industrie, des représentants syndicaux, des agents publics (ministères et collectivités locales), des chercheurs et des experts de chacun de ces trois secteurs. Pour favoriser l’expression de l’ensemble des participants, Construire l’écologie a organisé un événement sans public, en demandant à chaque participant de s’engager à ne pas dévoiler l'identité des autres participants. Ce cadre particulier a permis aux participants de s’exprimer plus librement.
Les grands enseignements de la concertation - quel avenir pour les secteurs de la batterie, des éoliennes et des pompes à chaleur ?
Pour la filière industrielle de la batterie électrique, un soutien clair aux véhicules électriques doit être exprimé par l’État et par les constructeurs automobiles sans remise en cause des trajectoires du Green Deal. Cette clarté permettra de rassurer l’ensemble des maillons de la filière sur l’orientation stratégique à prendre, et de visibiliser de nouveaux enjeux stratégiques. La priorité doit notamment être de développer une maîtrise technologique sur l’ensemble de la chaîne de valeur batterie, en développant notamment une économie circulaire des batteries en Europe. Les échanges ont rappelé que la mise en concurrence des sites de production automobiles ou de pièces et composants et les délocalisations multiples qui en ont découlées mettent en tension la filière française et ont un impact négatif sur la productivité et l’emploi. Il apparaît nécessaire d’introduire des obligations sur le recours à une certaine part de contenu local dans les approvisionnements en composants des usines françaises, y compris sur les batteries.
La filière industrielle de la pompe à chaleur demande, pour faire face à la baisse d’activité de la filière française, un prix de l’électricité compétitif par rapport au prix du gaz fossile, c’est-à-dire l’opposé du projet de loi de finance du gouvernement pour 2025. La filière a également besoin d’un cap clair, sans retour en arrière, sur la sortie du gaz dans les bâtiments avec une interdiction progressive d’installation de nouvelles chaudières à gaz. En parallèle, pour faire face à la concurrence chinoise et assurer la souveraineté industrielle européenne, les aides d’État doivent être conditionnées à l'installation de pompes à chaleur produites en Europe.
Le maintien des emplois et l’essor de l’importante filière industrielle française de l’éolien en mer dépend à partir de maintenant d’un cadencement régulier des futurs projets de parc éolien en mer par l’Etat. La course au gigantisme des futurs parcs doit être maîtrisée, pour éviter de réserver les futurs appels d’offres à des industriels chinois. La création d’une branche professionnelle dédiée aux salariés du secteur des énergies renouvelables, inexistante en l'état, semble être une condition nécessaire pour obtenir un soutien plus fort des syndicats à la filière industrielle et faciliter la communication entre la filière et l’État.
De manière transversale à chacune de ces filières se pose la question de la reconversion des salariés de ces secteurs, dans lesquels un certain nombre d'emplois sera amené à disparaître tandis que d’autres apparaîtront : en accord avec les acteurs spécialistes de chaque filière, Construire l’écologie se positionne en faveur d’une planification minutieuse des emplois et des compétences.
Le collectif constate également l’émergence d’intérêts sectoriels partagés par l’ensemble des acteurs des filières, des industriels aux syndicats, des concepteurs aux installateurs et aux élus locaux. Les politiques climatiques sont ainsi soutenues par une coalition sociale large en mesure de faire remonter ses demandes vers la puissance publique, d’entrer dans un rapport de forces avec les filières polluantes et obsolètes, et d’ancrer la transition dans le quotidien économique de la majorité.
Retrouvez tous les constats et propositions de Construire l’écologie dans la note : Sur le front industriel de la transition écologique : éoliennes en mer, pompes à chaleur, batteries. Construire l’écologie (2024)
A propos de Construire l'écologie
Construire l'écologie est un collectif qui rassemble les professionnels impliqués dans la transformation écologique, partout dans la société : secteur public, privé, syndical, associatif, académique. Il est animé par la volonté d’élargir et de donner une voix à la coalition d’acteurs pour la transformation écologique, d’ancrer dans la société et le débat public une culture technique et politique à la hauteur de ce chantier, et de répondre à ceux qui entendent saboter l’ambition écologique.
Agente ou agent en collectivité en charge de la décarbonation des mobilités, ouvrière ou ouvrier, technicienne ou technicien, ingénieure ou ingénieur responsable de l'installation de pompes à chaleur ou de la rénovation énergétique de logements, militante ou militant syndical revendiquant la reconversion écologique dans des conditions socialement justes pour les travailleurs de son domaine d'activité, salariée ou salarié d'un laboratoire d'idées écologiste ou chercheur ou chercheuse pilotant des travaux de recherche autour de la santé des sols : nous devons créer des liens entre toutes celles et ceux qui contribuent à la transformation écologique de notre société.
Pour cela, Construire l'écologie entend réunir ces professionnelles et professionnels au sein d'un même collectif afin de se rencontrer, construire des alliances et partager des connaissances lors d'événements et d'afterworks réguliers. Construire l’écologie se veut également être un outil pour porter dans le débat public une vision concrète, structurée et globale de la bifurcation écologique, ainsi que des moyens de la réaliser en matière d'atténuation et d'adaptation face au changement climatique, à la destruction de la biodiversité, aux pollutions, et aux autres limites planétaires. En s’appuyant sur les travaux de recherche, les nombreux scénarios de décarbonation établis pour la France et les compétences des membres du collectif. En tenant compte de tous les aspects de cette bifurcation écologique : les changements collectifs de modes de vie, les transformations des activités industrielles, le besoin d'une planification par l'État, la construction de protections collectives face aux crises écologiques, le soubassement indispensable de la justice sociale, ainsi que les nouvelles connaissances et le partage des savoirs qui font déjà consensus autour de cette transformation.
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